Relation abeilles-hommes

Les abeilles ont une place centrale dans nos pratiques collectives et dans nos imaginaires (dans les modes de vie, dans les pratiques culinaires, dans la légende et dans les folklores et plus encore dans la symbolique)[1].

L’abeille que nous connaissons est la même depuis 30 millions d’années. L’homme actuel (l’homo sapiens-sapiens), est apparu il y a 200.000 ans.

L’étude de poteries anciennes révèle que les produits de la ruche sont utilisés par l’être humain depuis la préhistoire. L’une des plus anciennes représentations de récolte de produits de la ruche a été retrouvée sur les parois de La cueva de la Araña, une grotte espagnole fréquentée par les chasseurs-cueilleurs durant la fin de la Préhistoire[2].

L’égyptien antique assimile l’abeille à des déesses. Les Egyptiens figuraient aussi l’âme humaine sous la forme d’une abeille (conception que l’on retrouve chez les Bantu, les Tshaga), pour qui sous tous les rapports, les abeilles sont des êtres humains[3]. En Égypte, on retrouve dans le temple solaire d’Abou Gorab, dès 2400 avant notre ère, les premières représentations de ruches domestiques.

Débute ainsi la « domestication » de certaines abeilles. Les abeilles « domestiques »[4] ou sauvages, solitaires sont des insectes pollinisateurs déterminants dans l’équilibre de l’écosystème et donc dans le processus de notre chaîne alimentaire dont dépend l’homme.

On retrouve des traces de ruchers dès le Néolithique. Selon les époques et les endroits, les hommes ont élevé les abeilles pour leur miel ou leur cire. L’homme a réussi à élever l’Abeille domestique (Apis Mellifera) en l’installant dans une ruche, pour pouvoir récolter son miel.

« Dans la Grèce archaïque, elle est liée aux déesses de la fécondité, comme la Potnia theron. Elle fut ensuite associée à Artémis, à la fois vierge et proche de la nature comme l’abeille, ainsi qu’à Déméter, déesse de l’agriculture, très fêtée notamment parce qu’elle incarne la fertilité des cultures, mais aussi la fécondité des femmes… La culture judéo-chrétienne reprend ces motifs grecs. Jusque dans des gravures populaires assorties de leçons de morale, l’abeille symbolise la vertu, l’honnêteté, la droiture en toutes choses. Au xixe siècle, un glissement s’opère puisqu’elle incarne plus spécifiquement des valeurs bourgeoises, comme l’assiduité au travail, l’épargne et le souci de l’avenir.[5] »

Au Moyen Âge, cire et miel sont également exploités. Le miel est le seul édulcorant, il a aussi une place importante dans la pharmacopée.

Au XVIe siècle, le sucre de canne remplace le miel à la table des plus riches. Avec le développement de la liturgie, des fêtes religieuses et processions, les cierges en cire d’abeille prennent le dessus.

Malgré le développement de la culture de la canne à sucre et de son raffinage en Syrie et en Égypte, puis sa diffusion en Europe méridionale, dans la péninsule ibérique et en Sicile notamment, le miel continue de représenter la principale source sucrée pendant tout le Moyen Âge en Europe

 « On sait que le miel faisait l’objet d’un commerce tout autour de la Méditerranée et que ses usages étaient nombreux : dans l’alimentation, bien sûr, mais aussi comme base pour la préparation de médicaments et de cosmétiques, ou encore comme produit d’embaumement », ajoute Vincent Jolivet, archéologue au laboratoire Archéologie et philologie d’orient et d’occident Unité CNRS/Institut national de recherches archéologiques préventives/École pratique des hautes études/École normale supérieure/Labex Transfers/PSL Université Paris.

Aux XVIIe et XVIIIe siècles s’établissent de grandes manufactures de cire. Mais, sous Napoléon 1er, l’arrivée de la paraffine et le blocus continental conduisent à un nouveau développement de la production de miel[6].

Ce n’est qu’au XIXe siècle que la technique de collecte du miel connaît une évolution majeure, avec l’utilisation de rayons amovibles en bois, qui évite une destruction d’une partie de la ruche pour extraire le miel.

D’autres matériaux sont mentionnés dès l’Antiquité pour la construction des ruches domestiques : roseau ou jonc tressés, bois… Dans ce dernier cas, le tronc d’arbre est évidé afin que les abeilles puissent y coller leurs rayons, placé verticalement et surmonté d’un couvercle. Ruches en vannerie ou en paille dans le nord de la France, la Germanie et les Flandres, ruches-troncs ou ruches cylindriques en liège dans les régions méditerranéennes, ruches en céramique en Afrique du Nord…

Les abeilles sont primordiales pour la pollinisation et donc pour la présence des fleurs, légumes et fruits. Les abeilles sont un chaînon vital de notre écosystème.

[1] https://www.franceculture.fr/emissions/concordance-des-temps/lhomme-et-labeille-0

[2] Roffet-Salque Mélanie , Regert Martine, Zoughlami Jamel, 2015, Widespread exploitation of the honeybee by early Neolithic farmers, Nature volume 527, pages 226–230

[3] J.Leclant, L’Abeille et le Miel dans l’Egypte pharaonique in R. Chauvin Traité de Biologie de l’Abeille, Paris, Masson, 1968, vol.5, 51-60 ; J.P.M.Montet Etudes sur quelques prêtres et fonctionnaires du dieu Min in J.N.E.S 9, 1950, 18-27

[4] Il n’y a véritablement domestication, au sens technique du terme, qu’à partir de l’apiculture moderne, Tétart, G. 2001 L’Abeille et l’apiculture. Domestication d’un animal cultivé. Techniques & Culture 37 : 173 -196. ; Romain Simenel, Antonin Adam, Audrey Crousilles, Lahoucine Amzil et Yildiz Aumeeruddy-Thomas, « La domestication de l’abeille par le territoire », Techniques & Culture, 63 | 2015, 258-279.

[5] Janine Kievits, « L’abeille, de mythe en mythe », Labyrinthe, 40 | 2013, 75-79.

[6] Catherine Mousinho, « Ruches, ruchers et récoltes de miel et de cire », Questes, 15, 2008, 19-38.